Cet article est extrait d’une série d’articles (en l’occurrence le premier) mettant en avant mon parcours que j’ai réalisé pour sortir de l’addiction.
Il y aurait sans doute trop chose à parler au travers d’un simple article pour tout dire les éléments qui me viennent en tête. En effet, il n’est pas simple d’y aborder ces éléments sans voir le visage de personnes non-concernées s’altérer enclenchant un certain nombre de préjugés. La honte ne m’habite pas, j’en tire une force au quotidien pour des raisons suivantes : je suis alcoolique et polytoxicomane. À partir de ce moment où j’ai écrit ces deux mots : les visages tombent comme des masques qui me voient depuis près de deux ans et demi d’une nouvelle vie. Si certains ne comprennent pas vraiment, ce n’est pas bien grave. Pour cause, la vie n’a pas toujours été un long fleuve tranquille, de paix et de liberté (dans le sens du texte). Si certains peuvent comprendre, je pense qu’il y a eu une résurrection : une vie où la mort m’attendait à tous les carrefours et désormais une vie où je suis entièrement maître de ce que je fais dans les limites possibles.
Certains verront certainement des références bibliques dans l’idée de résurrection, mais l’idée se résume au fait que j’étais comme de nombreuses personnes dans mon cas, c’est-à-dire des morts-vivants. Je me tuais à petit feu et chaque jour qui passait, cela se résumait à approcher au plus près d’un basculement qui emporte trop de personnes. Pourtant, nous étions jugés par la société qui ne voyait qu’au travers de cela : un vice et un choix. Or, la société sous la fusion des lobbies de l’alcool et du dogmatisme prohibitionniste en ce qu’il concerne les drogues a fait que de nombreuses personnes de mon entourage ou des connaissances n’y ont pas survécu. C’est un drame pour de nombreuses familles et les proches.
Quand je repense également au début d’overdose que j’ai faite en 2017. Nous ne sommes pas dans une fiction comme Scarface, mais des éléments vécus. Cela change toute la donne.
Certains diront que j’étais responsable de mon acte et que je dois en assumer les conséquences. Or, j’ai appris qu’on ne choisit pas sa maladie, mais on choisit son rétablissement et la force d’en sortir. Mais voilà, si l’avant de cette sensation d’en crever et de n’avoir pas grand-chose à faire peut étonner, elle n’est que le résultat d’une consommation qui était déraisonnable à l’image des cravings. Cela peut paraître anecdotique, mais la force que j’en tire régulièrement me permet de surpasser, mais surtout d’admettre que je suis un survivant de la drogue, comme certaines prostituées sont des survivantes du proxénétisme. Dans ces sens, je vois très bien que j’ai perdu de nombreux amis et des connaissances tant dans mon parcours de polytoxicomanes autant en-dehors qu’en dedans du rétablissement.
Au travers des nombreuses cures et hospitalisations à répétition que j’ai faites, j’ai vu une réalité différente que l’on nous montre que très rarement : des personnes abîmées physiquement et psychiquement.
Cela me permet de regarder dans le rétroviseur, je remarque un parcours réalisé de différentes manières. J’ai fait des structures à la chaîne sur différents formats et différentes méthodes. Je crois et j’en suis persuadé que tant qu’on n’a pas touché le fond, le fait de “suicider” graduellement au travers de la consommation de produits divers prend un véritable sens. Je suis arrivé au plus bas lors de ma dernière rechute. J’ai compris que j’étais malade. J’ai admis que le combat était terminé d’avance. J’ai capitulé et j’ai enchaîné sur une nouvelle vie.
Je vois aussi le violent sevrage au Tramadol que j’ai fait dans des structures de soins, je me dis aussi que j’ai échappé à des doses qui s’avèrent être létales pour de nombreuses personnes, notamment lorsqu’on voit la crise des opioïdes aux États-Unis d’Amérique. Loin de là, j’en ai particulièrement bavé, mais j’ai pu regagner ma liberté. Cette dernière aura été arrachée aux termes d’une grande souffrance dans le cadre d’un sevrage à sec (chose que je recommande à personne, mais de le faire par paliers en lien avec une équipe médicale) fait à l’Hôpital, puis en clinique. Si je regrette méthodiquement la forme du sevrage qui laisse des séquelles psychologiques, les résultats sont bénéfiques. Aujourd’hui, je ne peux plus toucher un seul opioïde au risque de sombrer dans l’addiction (active) avec un effet domino avec les autres produits. Cela apparaît comme un piège, mais lorsque j’ai des douleurs, je suis obligé de prendre sur moi. Les autres médicaments non-opioïdes n’ont aucun effet. Le paradoxe se retrouve dans un choix cornélien : rechuter ou être libre, mais souffrir. J’ai choisi la seconde option, la liberté vis-à-vis de l’addiction (active) n’a pas de prix.
Je sais très bien qu’au travers d’une société où le fait de dire des vérités soulève de nombreuses questions et le dire risque de détourner les personnes d’un regard et de créer une certaine forme de jugement sur ce que nous étions, mais aussi que nous sommes actuellement. Or, il semble conscient que je vis au travers d’une véritable épée de Damoclès. Beaucoup d’entre vous ont une image clairement négative de celui qui a des problèmes d’addiction. Pourtant, l’alcool tue entre 40 et 50 000 personnes. Il semble conscient que ce problème s’avère résider comme un problème de société, dont il faut faire face. Je le sais bien, l’image qu’on a du toxicomane ou de l’alcoolique s’avère fausse tout comme les différentes pathologies psychiatriques. Clairement, on appelle cela la “psychophobie”.
L’inclusion s’enracine objectivement comme une véritable chimère. Aujourd’hui, la société française telle qu’elle véhicule son image apparaît comme grotesque, dangereux et caricaturale. Au travers de mon expérience, l’idée même de ce qu’il nous arrive peut surprendre les personnes tout comme de la métamorphose qui s’y accompagne. Aujourd’hui, je suis en mesure de narrer une expérience, de mettre sur un article : l’idée de soutenir qu’il existe une vie après la consommation et tous les drames qui s’y accompagne.
Pourtant, les personnes sont nombreuses à rester dans l’idée d’une vision où nous étions avant. Or, on peut dire que la société française ne nous a pas aidé, pire elle continue de nous juger sur ce que nous étions et non pas ce que nous sommes devenus. En effet, le parcours du combattant pour sortir de ce couloir de la mort en dit long. J’étais condamné à mort à court terme au travers de ma maladie.
Au moment où l’on traite de “l’affaire Palmade” en raison de sa consommation de produits stupéfiants ayant entraîné un accident de la route, je remarque qu’à aucun moment donné, il est question d’un plan de sortie à grande échelle pour les toxicomanes. Certes, chacun est responsable, mais ce n’est pas au ministre de l’Intérieur de s’occuper d’un problème de santé publique, mais au ministre de la Santé. Or, les différentes politiques de santé publique concernant la COVID-19 sont déjà lamentables. On se doute bien d’une chose : face à une situation qui commence à déraper avec la “démocratisation” de la cocaïne, l’idée s’avère d’aller à la racine du problème, c’est-à-dire vers la demande afin d’assécher l’offre permettant de fermer progressivement les “fours”.
En partant de ce constat élémentaire, je constate qu’en lisant les articles de la presse, je me rends bien compte de la problématique qui s’amplifie chaque jour. Déjà que la Macronie plane en permanence, mais sur cette question-là, elle se situe entre Pluton et la Ceinture de Kuiper. Il y a une déconnexion de la réalité absolue. Dès lors, nous voyons très bien où se range ceux qui dirigent le pouvoir, c’est-à-dire vers le populisme rance pour grappiller des voix toujours plus conservatrices et réactionnaires.
Hélas, ils ne peuvent pas comprendre l’idée même qui aboutit à sombrer dans l’alcool et dans les différentes drogues. Chaque vécu apparaît comme individualisé. Chaque organisme n’accroche pas toujours aux différents produits. Nous ne sommes pas tous égaux devant les différents produits. Chaque vécu impose une approche différente. Pourtant, la psychiatrie est la parent pauvre de l’Hôpital, et l’addictologie s’avère être la dernière à recevoir des deniers dans l’assistance publique. L’état misérable des services d’addictologie en dit long.
Au moment où les beaufs et autres incultes veulent une ville propre, notamment en ce qu’il concerne les différents trafics de drogue, mais sans changer les règles alors je ne peux dire : leurs idées sont les héritières d’une certaine forme de stalinisme au travers du degré zéro de la connaissance en addictologie. Or, je ne parle pas de degré Celsius, mais bien de Kelvin. Autant dire qu’ils sont dans une guerre qui ne sera jamais gagnée où de nombreuses personnes périront. Là où un trafic est démantelé, un autre trafic se crée. On appelle cela le capitalisme. Or, Emmanuel Macron le glorifie sous le nom de “capitalisme populaire”. C’est exactement ce qu’il fait au travers de l’hypocrisie.
Ainsi, les riverains de l’Hôpital Lariboisière veulent aussi revoir des seringues au sol comme si de rien n’était. Je n’aimerais pas habiter dans leurs porcheries. Quant aux différents campements à Stalingrad gangréné par le trafic de Crack (de la cocaïne basée à l’ammoniac), ils hurlent de slogans divers. Pourtant, ces petits bourges n’ont pas réalisé la détresse d’être en manque de Skenan, Méthadone, de Cocaïne ou encore du Crack. Ils veulent juste un quartier nettoyé au Karcher comme le disait Nicolas Sarkozy. Il s’agit pour ces personnes n’ayant que l’individualisme méthodologique que de regarder au bout de leur nez et pas plus loin. L’égoïsme absolu, le sécuritarisme et la gentrification s’imposent.
Les salles de shoot sont une alternative objective pour diminuer la consommation et donner un cadre pour ceux qui sont adeptes de la RDR (Réduction Des Risques). En effet, pour les usagers de produits stupéfiants, une question se pose. Faut-il se droguer dans des endroits avec un contrôle médical ou dans les toilettes devant l’Hôpital où se trouve d’ailleurs des équipements DASRI (Déchets d’Activités de Soins à Risques Infectieux) ? Cette approche permet de mieux comprendre non pas une fiction où il n’y aurait aucun malade, mais bien une réalité à laquelle il faut s’y confronter. Ce n’est pas par plaisir que des personnes consomment des produits, mais bien parce qu’il s’agit d’une maladie. Oui, il faut le dire à ces personnes qui déploient des banderoles : la toxicomanie est une maladie chronique comme le diabète. Mais les soins permettent de la maîtriser, l’un par un arrêt de la consommation (qui peut être viser comme objectif) au travers d’un encadrement thérapeutique et l’autre par des médicaments. Ainsi, l’assèchement de la demande permet d’agir sur l’offre. Si la demande baisse, l’offre s’assèche.
Quand j’écrivais l’article disant que nous étions victimes de la politique pénale et répressive pour ne pas dire des “vaches à lait” afin de diminuer toujours plus les libertés individuelles et de semer une idée dangereuse à savoir une loi pour empêcher tous les cartels de drogue. Mais, voilà nous ne sommes plus des victimes d’une maladie, mais bien des acteurs des différents cartels de drogue. En s’en prenant aux victimes : Gérald Darmanin et sa flicaille veulent éradiquer les consommateurs en les mettant soit dans des prisons où la drogue circule, soit dans des Hôpitaux ou cliniques psychiatriques en leur faisant une guerre sans scrupule. Cela ressemble étrangement à la prohibition américaine où l’alcool était interdit. Aucune de ses méthodes n’a été efficace. Il existe différents modèles pour s’en sortir, mais les Hooligans des idées sécuritaires ne jaugent que par la répression et cela apparaît comme un échec répété à l’infini. Plus sectaire que ces gens dangereux ou qu’un macroniste ou même de ses anciens collègues comme Cazeneuve, Valls et consort, il n’y a que la mort au bout du chemin. C’est bien ça le problème et personne n’y trouve rien à redire. La prohibition tue des innocents.