Le Front Progressiste pour barrer la route aux fascismes

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Le fascisme est une hydre à plusieurs têtes. La montée idéologique de l’extrême-droite se diversifie au sein des nombreux courants politiques et parfois de façon antagoniste. Le “barrage Républicain” depuis des dizaines d’années ne fonctionne plus, il est temps de laisser place au “Front Progressiste”.

La mort du “barrage républicain”

La thématique d’un fascisme avec différentes ramifications peut laisser place à la vision trotskyste du “social-fascisme” 1 . Longtemps critiquer par les partisans d’un “barrage républicain”, nous sommes désormais face au mur. L’idéal de la Cinquième République ne séduit plus au sein de la population. Dans le même temps, nous assistons progressivement à une rupture démocratique dans les élections territoriales (mairie, conseil départemental et régional, et européen).

Toutefois, même dans les élections présidentielles et législatives, le vote ne convainc plus. Dès lors, l’abstention devient la matérialisation d’un mal-être généralisé au travers d’un refus de la participation à ce moment démocratique ou encore d’une indifférence à ce qu’il se passe au niveau politique. Un certain nombre de charlots de commentateurs font le jeu de la subjectivité en condamnant les abstentionnistes. Ces godillots, auto-proclamés comme spécialiste de la politique déresponsabilisent les intervenants du système politique. Ainsi, l’abstention n’a jamais permis de voir d’une manière quelconque dont elle participerait à la hausse de l’extrême-droite. 

Dans le “même temps”, de nombreux partis politiques qui appartenaient hier au barrage Républicain dérivent progressivement vers le néofascisme. Ainsi, le naufrage risque d’être d’une brutalité lorsque le barrage va céder. Il convient de désigner d’une manière ou d’une autre qu’il est mort. L’heure est venue de faire un deuil afin de progresser sous la mise en application d’un “front progressiste”.

La lepénisation de la société

Le développement du “front progressiste” s’articule comme son nom l’indique sur des bases de progrès. Il convient dès lors de définir ce qu’il incombe derrière cette notion de “progrès”.

La rhétorique bourgeoise consiste à défendre la question de la République et rien que la République. Pour autant, la dédiabolisation de l’extrême-droite au travers d’une incorporation des idées politiques dans la sphère publique par les partis bourgeois démontre d’une manière ou d’une autre que le “barrage républicain” déborde. Ainsi, la France peut se réveiller au travers de l’extrême-droite sous couvert de la République et du progrès. Dans le même temps, le progrès dans les politiques publiques n’est point le même entre le “monde du travail” et le “monde du capital”. Ainsi, les “luttes sociales” demeurent fondamentales tout comme inhérente à la dynamique du progrès pour les premiers, alors que les seconds se fixent sur les “luttes sociétales” comme moteur de progrès pour l’ensemble de la société à savoir : le mariage pour tous, la PMA pour les couples lesbiens, etc. Toutefois, il serait ambigu de dire que le progrès du camp social ne prendrait pas en compte les “réformes sociétales”. De ce fait, le programme politique de la bourgeoisie qui se réclame des luttes sociétales reste le même que celui de l’extrême-droite concernant l’approche sociale : destruction de toutes les “conquêtes sociales” afin de laisser le marché prendre le pas. Dès lors, d’une bourgeoisie à une autre, la question fondatrice demeure le “libéralisme économique”.

Quant au libéralisme philosophique, il s’efface progressivement. D’ailleurs, la pêche de différentes personnalités au sein de l’extrême-droite comme Nathalie Loiseau, ancienne du GUD 2 ou encore Gérald Darmanin, ancien de l’Action Française3 ne laisse pas indifférent. Dans ces conditions, on ne peut faire confiance à la bourgeoisie comme moteur du progrès. Ainsi, le seul progrès qui vaille est celui du “monde du travail”. Toutefois, dans les conditions actuelles du confusionnisme et du complotisme d’une partie du “monde ouvrier”, il semble nécessaire de garder une ligne orthodoxe en matière de défense du progrès via la lutte des classes.

Ensuite, je constate de façon très claire que le repli nationaliste et souverainiste de tous les pays au travers de la montée de l’extrême-droite et de la droite nationaliste tout comme la gauche populiste4 se targue certes d’une approche clairement différente de la souveraineté. Les fascistes ont une notion de souveraineté de type nationale alors que la gauche populiste s’inscrit dans une logique populaire. Nonobstant cette différence significative, il convient de souligner qu’il n’y a pas une seule seconde sans que cela ne puisse se traduire par un mal-être généralisé au sein d’une crise sociale, économique et culturel 5. 

Les partisans d’un ultralibéralisme à la carte se targuent d’être une tangente. Pour autant, nous le savons très bien se replie identitaire ne permet qu’au capitalisme de se maintenir. Les différents mécanismes pour faire barrage à l’extrême-droite s’inscrivent dans un cadre républicain. Or, nous constatons depuis près de quarante ans : une lepénisation de la société. Ainsi, le décalage progressif vers l’extrême-droite fait que des personnalités qui ont participé au front républicain se retrouve au sein de l’extrême-droite comme Thierry Mariani. Le barrage républicain n’a plus de sens en raison des différents mercato politiciens et des passages progressifs vers l’extrême-droite par pur opportunisme. 

Toutefois, l’idée de combattre rigoureusement l’extrême-droite a du plomb dans l’aile dans une époque clairement néofasciste et néoconservatrice. D’autant que la métaphore du barrage consiste à retenir progressivement les eaux, mais face à une cohésion très claire de l’augmentation du niveau de l’eau, même si ces dernières années, cela a tendance à stagner. Il convient de dire que le barrage sert surtout à produire de l’électricité en recyclant l’eau. C’est exactement ce qu’il se passe : le Rassemblement National stagne, mais ses idées sont entièrement diffusées au sein de la société au travers des politiques publiques. Dès lors, le barrage républicain semble clairement inefficace. Ainsi, il convient de souligner qu’il y a une autre façon de voir les choses au travers d’un changement de dialectique. Il semble nécessaire de ne plus parler de “barrage”, mais de “front”. En effet, nous sommes en guerre contre l’extrême-droite de façon idéologique, mais aussi au travers des partis, des associations et des groupuscules. Le faire de devoir voter entre le moins pire, mais qui finalement adopte les mêmes politiques interroge.

Les différents courants bourgeois s’entraident malgré les divergences

Ainsi, il me semble nécessaire de voir que nous n’avons rien à attendre à la bourgeoisie d’une manière ou d’une autre. Pire ! Dans les périodes de crise, il agite l’épouvantable drapeau de l’ordre et de l’autoritarisme afin de garder démocratiquement ses privilèges. C’est d’ailleurs une des variables en ce qu’il concerne la mutation et la transformation des classes sociales entre la féodalité et le passage vers le capitalisme.

La société bourgeoise moderne, élevée sur les ruines de la société féodale, n’a pas aboli les antagonismes de classes. Elle n’a fait que substituer de nouvelles classes, de nouvelles conditions d’oppression, de nouvelles formes de lutte à celles d’autrefois.6.

Ainsi, j’assiste d’une façon clairement impuissante à la montée du racisme peu importe la forme (dont l’antisémitisme), le rejet de la devise républicaine tout comme de l’universalisme, de la réécriture de l’Histoire afin de créer un récit national, etc. Dans ces conditions, nous ne pouvons nous associer au “parti de l’ordre” :

Dans son programme électoral, le parti de l’ordre proclama directement la domination de la classe bourgeoise, c’est-à-dire le maintien des conditions d’existence de sa domination, de la propriété, de la famille, de la religion, de l’ordre ! 7

La classe dominante l’a bien comprise : les dictatures à parti unique ne font guère rêver. Ainsi, la lente transformation d’un modèle où la “philosophie libérale” tend clairement à replacer une version hybride sous la forme d’une “démocrature”. Ainsi, l’apparition des élections ne constitue qu’un moyen pour asseoir une logique autoritariste. En effet, la volonté de correspondre aux électeurs permet de créer une dérive par des régimes dictatoriaux tout en gardant l’apparence d’une démocratie au travers seul mécanisme de vote. Il s’agit d’une démonstration assez radicale que le vote ne permet pas la démocratie. Il semble clairement nécessaire de voir que la “séparation des pouvoirs”, le respect de “l’Etat de droit”, l’indépendance de la presse sont autant d’éléments clairement bafoués. 

Les pays d’Europe de l’Est ont criminalisé le communisme pour des raisons qui peuvent apparaître cohérentes au vu de l’Histoire de la stalinisation. Pourtant, les apprentis dictateurs comme Òrban & co mettent en application le stalinisme sous l’angle d’un capitalisme radical reprenant le processus stalinien : 

Jusqu’à quel point la politique socialiste de la classe ouvrière peut-elle être appliquée dans les conditions économiques de la Russie? Il y a une chose que l’on peut dire avec certitude : elle se heurtera à des obstacles politiques bien avant de buter sur l’arriération technique du pays. Sans le soutien étatique direct du prolétariat européen, la classe ouvrière russe ne pourra rester au pouvoir et transformer sa domination temporaire en dictature socialiste durable 8

Finalement, la phase de transition devrait déboucher sur une interdiction des signes capitalistes dans l’ère post-capitaliste de ces pays-là lorsqu’ils seront sortis de l’endoctrinement de la haine de la démocratie et de l’Europe.

La problématique réside en Occident comme l’une des façons la plus particulière au niveau de l’avancée des démocraties libérales. Toutefois, nous avons vu que l’impérialisme empêche par ses différents de pression et les technologies modernes en matière d’expansion de l’économie capitaliste. Ainsi, le lecteur a compris à partir de ce moment-là que le modèle de la classe dominante avait différents recours y compris à des régimes autoritaires. Ainsi, la question de décortiquer la démocratie ouvrière et la dictature du prolétariat devient un élément majeur.

Dépasser la démocratie libérale

La question de la démocratie libérale peut paraître impromptue pour de nombreux prolétaires souhaitant rapidement en finir avec le capitalisme. La volonté sociale-démocrate apparaît dès lors comme la construction du mouvement ouvrier, c’est-à-dire à l’ère du XXIe : le salariat, dans sa phase initiale. Toutefois, la position ne relève pas d’une volonté de créer une politique sociale-démocrate, mais bien une politique pour construire le socialisme. En effet, la social-démocratie est incapable de créer un politique pour amener vers le socialisme. La défense des valeurs de la République tout comme la démocratie au sens d’une “République Sociale” comme la vision primitive de créer d’une certaine manière afin de créer les conditions fondamentales pour la transformation d’une démocratie libérale vers une démocratie ouvrière. Ainsi, la promotion de la démocratie libérale comme élément nécessaire dans le cadre de la construction d’un “monde libre”.

La démocratie libérale

La démocratie au sens libérale telle que nous la connaissons en Occident se traduit d’une façon ou d’une autre par des valeurs. En effet, les grands philosophes ont imprégné la mise en place d’une pensée clairement individualiste afin de créer une émancipation collective tout en étant au niveau de l’unité indivisible.

Le “libéralisme philosophique” permet de faire bloc vis-à-vis des démocraties autoritaires, c’est-à-dire des régimes hybrides ou encore la lutte de fond contre le totalitarisme de type étatique tel le fascisme, le nazisme ou encore le stalinisme. En effet, la pensée libérale au sens, stricto sensu, crée une barrière intellectuelle et libérale. 

Le nationalisme au niveau de l’atomisation de l’individu fait passer l’intérêt supérieur de la Nation engendrant de facto une perte absolue des droits individuels et collectifs. La construction de ces dictatures se forge sur un “récit National” 9 taillé sur pièces afin de donner un “élan victorieux” à ces dictatures dans le cadre d’une violence inouïe. Le libéralisme au travers de la “séparation des pouvoirs”, le “parlementarisme” (quand bien même il est bourgeois) ; la liberté de la presse, de manifester, de circuler, de penser, de croire ou pas, etc. Tous ces éléments matérialisent des contre-pouvoirs importants afin d’éviter que la “tyrannie de la majorité” (des électeurs) ne dérive pas vers un pouvoir despotique.

Le libéralisme en période de crise devient un pilier comme base que la “gauche radicale” doit défendre. En effet, le libéralisme ne se résume point à la question uniquement de l’économie, mais il s’agit d’un ensemble de valeurs que nous devons défendre afin qu’elles deviennent un socle pour la construction du socialisme, mais aussi de créer un front contre les idées de l’extrême-droite. Il convient de souligner que les démocraties libérales interviennent à un moment donné précis de l’Histoire. Toutefois, la “philosophie libérale” au sens des libertés individuelles peut que déboucher sur une société ouverte. Par ailleurs, il convient de souligner que la plus grande régression en matière de ces dernières. En effet, le progrès qui peut découler des sociétés libérales peut être un rempart. Dans le même temps, elle est un outil de prise du pouvoir par les mouvements antilibéraux au sens que ces derniers ne défendent pas.

Dès lors, il convient de faire “l’apologie” de la démocratie libérale afin de fonder les bases d’une démocratie solide qui ne s’écroule pas à chaque tempête ou au tremblement de terre. En effet, ce modèle advient sur les bases permettant de créer des délégués au peuple (je sais, cela fait très marxiste.) et non des élus avec les privilèges, dont ils disposent dans le cadre de la France surtout. Ainsi, les délégués permettent de représenter réellement les formations politiques et les courants transcendant la politique. Or, le verrou reste la Constitution. En effet, il ne s’agit pas de vouloir la fin de l’Etat de droit comme le souhaitent les partisans du totalitarisme. Toutefois, la surenchère légaliste intervient à un moment donné où le libéralisme philosophique laisse place aux libéraux économiques. Ainsi, les “religieux” d’hier sont restés d’une certaine manière dans une transition d’époque.

Si la fondation d’un Etat de droit écrit au travers des lois et des jurisprudences (dans le cadre des interprétations des lois) permet de s’assurer qu’elles sont les mêmes pour toutes et que leur application s’inscrit dans une interprétation que donnera le pouvoir judiciaire. La Justice (dont le Conseil Constitutionnel) permet entre autres de créer un espace afin de faire respecter les différentes lois dans leur esprit ou de retoquer certaines lois lorsqu’elles sont désaccord avec la Constitution.

La démocratie sous le néolibéralisme

Le néolibéralisme ne cesse de gagner des batailles. Il apparaît victorieux. Toutefois, la plus grande défaite que les salariés peuvent ressentir s’inscrit typiquement dans le cadre de la démocratie qu’ils devraient défendre. Sauf que le néolibéralisme n’utilise que la démocratie comme un vecteur pour imposer “les réformes structurelles” afin d’établir la “contre-révolution” 10. Ironiquement, nous parlons de “libéralisme” pour le mouvement conservateur. Dans les faits, il semble nécessaire de voir que le Parlement n’est qu’un moyen pour appliquer la grande régression au niveau des droits démocratiques. La question de l’universalisme se pose également au travers de la mécanique de l’application du droit. En effet, les exceptions sont tellement nombreuses que l’on peut se demander si la République telle qu’elle est conçue est encore universelle.

Enfin, il convient d’être des bâtisseurs du “nouveau monde” afin de faire rayonner la démocratie. Cependant, une question me vient : peut-on être libéral sur le plan philosophique et marxiste sur le plan politique ?

Démocratie ouvrière vs dictature du prolétariat

Le “marxisme-léninisme” (ML) a laissé une emprunte indélébile dans les pays de l’Est de l’Europe. Loin sans faute, si l’apport de Lénine aux différentes théories reste important, sa mise en pratique reste une véritable barbarie et ne débouche que sur du totalitarisme. Toutefois, il semble très clair de voir que d’autres courants au sein du communisme ont pu voir le jour au travers d’une vision réaliste de la démocratie. Ainsi, il semble nécessaire de ne pas tout mélanger au sein du communisme. Pour autant, la marque indélébile du ML tend justement à mettre en avant que le communisme ne porterait que la barbarie et la dictature. Il convient de souligner que les dictatures se revendiquant du communisme11 n‘aide pas vraiment à changer de regard sur la chose. Cependant, les détails ont une importance : le communisme sans la démocratie n’est qu’une supercherie. Dans le même temps, les dictatures communistes génèrent une très forte réaction au sein de la société au travers de mouvement d’extrême-droite, nationaliste et néoconservateur. Là, où les dictatures se revendiquant du communisme sont passées, tout est à reconstruire sur le plan des libertés individuelles. La transition vers une démocratie libérale comme point d’ancrage à l’évolution d’une société communiste demeure nécessaire. Toutefois, il convient de souligner si nous nous posons des questions sur la question d’une Assemblée Nationale ou d’une République des Conseils12.

L’évolution du courant communiste dans les masses

La question qu’on peut se poser réside dans le fait si les deux théories que nous aborderons plus bas se résument d’une manière ou d’une autre à l’évolution progressive des idées socialistes et communiste au sein du prolétariat (qui s’est transformé dans un salariat). En effet, la prise du pouvoir par le prolétariat dans sa globalité peu importe le secteur d’activité demander de créer une confédération prolétaire et une “Union Populaire” comme le souhaite le sinistre Jean-Luc Mélenchon13. Ainsi, il claire et net de se poser la question de Rosa Luxemburg : Les masses sont-elles “mûres”14 ? Dans le contexte de la montée en puissance du néolibéralisme au travers de réformes très grandes réformes structurelles anti-salariales et anti-prolétaires, la réplique devrait se solder d’une manière ou d’une autre par un grand mouvement vis-à-vis du monde du capital et la remise en cause même du capitalisme. Ainsi, la structuration des masses intervient à un moment phare de la vie politique.

Dans le contexte de la montée en puissance du néolibéralisme au travers de réformes très grandes réformes structurelles anti-salariales et anti-prolétaires, la réplique devrait se solder d’une manière ou d’une autre par un grand mouvement vis-à-vis du monde du capital et la remise en cause même du capitalisme. Ainsi, la structuration des masses intervient à un moment phare de la vie politique. Toutefois, cette dernière subit les différentes lois visant à flexibiliser le marché du travail au nom d’une hypothétique “flexisécurité” et en même temps permettent la libéralisation de l’économie. Ainsi, il apparaît dans cette dernière que les obstacles visant à la construction d’un mouvement politique de classe multiforme et dans sa diversité doivent permettre de créer un vaste front contre le capitalisme. En effet, le capitalisme et la classe dominante portent en eux : le néofascisme. À l’heure des réseaux sociaux, la question syndicale demeure l’élément moteur. De ce fait, l’idée à propos d’un parti guidant les salariats, mais d’un “front progressiste” avec ses valeurs.

La question de l’évolution dans les masses du courant socialiste15 et communiste se traduit d’une manière ou d’une autre par la question du rapport de classe vis-à-vis du capital. Le contexte actuel se résume à une vision en faveur des néolibéraux. Ainsi, il semble nécessaire de citer une nouvelle fois Rosa Luxemburg :

La révolutionnaire allemande lancera également :

C’est seulement au travers des combats de la révolution que le prolétariat accédera à une pleine maturité, dans tous les sens du terme 16

La vision qui s’en dégage se résume à la construction du socialisme de façon universelle. Ainsi, il me semble pessimiste de voir que les partis néolibéraux et conservateurs mènent l’agenda politique. Dans le même temps, il appartient d’une façon ou d’une autre à voir que la “contre-révolution conservatrice” avance à pas double. La classe dominante fait sauter les verrous les uns après les autres. 

La question des masses renvoie également à la logique de l’Internationale, c’est-à-dire de la révolution globale en opposition avec la construction du “socialisme dans un seul pays”. Rosa Luxemburg lancera un signal d’alarme prévenant du risque qui s’inscrivit de la démarche de Lénine et de Staline :

Mais, internationale par sa nature même et dans son essence profonde, la politique de classe du prolétariat ne peut être réalisée que sur le plan international. Si elle se limite à un seul pays tandis que les ouvriers des autres pays pratiquent une politique bourgeoise, l’action de l’avant-garde révolutionnaire est dévoyée dans ses conséquences ultérieures17.

Toutefois, l’idée même du socialisme appartient à une manière ou d’une autre à la vision du futur puisque cela fait des siècles qu’elles existent. Toutefois, elle s’adapte par rapport aux différents contextes. Ainsi, la révolution prolétarienne ne demeure plus une utopie, mais une façon d’appliquer la rigueur du matérialisme et du socialisme scientifique 18, il semble nécessaire de voir la question de la transformation du socialisme comme le dit de façon concrète, Rosa Luxemburg :

La révolution prolétarienne commencée aujourd’hui ne peut avoir d’autre but et d’autre résultat que la réalisation du socialisme. La classe ouvrière doit avant tout essayer de s’emparer de toute la puissance politique de l’Etat. Pour nous, socialistes, ce pouvoir politique n’est qu’un moyen. Le but pour lequel nous devons employer ce pouvoir, c’est la transformation fondamentale de tous les rapports sociaux.

Aujourd’hui, toutes les richesses, les plus grandes et les meilleures terres, les mines, les machines, les fabriques, appartiennent à quelques grands propriétaires et grands capitalistes. La grande masse des travailleurs ne reçoit d’eux qu’un misérable salaire pour les empêcher de mourir de faim, en échange d’un pénible travail. La société actuelle a pour but l’enrichissement d’un petit nombre d’oisifs.

Cette situation doit changer entièrement. Toutes les richesses sociales, le sol et le sous-sol avec tous leurs trésors, toutes les fabriques, tous les instruments de travail doivent être enlevés aux exploiteurs. 19

Enfin, les alternatives au capitalisme ne manquent pas, mais il faut se le dire : le socialisme peut importe sa forme (après cela se débat) reste l’alternative absolue au capitalisme enclenchant directement la démocratie ouvrière.

Si on craignait de suivre cette voie, la seule possible, il ne restait d’autre ressource que de renoncer complètement à la lutte et a toute politique inspirée des principes du parti, c’est-à-dire renoncer à toute lutte politique. 20

Ainsi, après parler de la question de l’organisation du prolétariat, il semble tout à fait nécessaire de parler de la question de la mise en application d’une démocratie ouvrière qui serait la forme la plus absolue de la démocratie.

La démocratie ouvrière

La position de Rosa Luxemburg est sans nul doute la plus aboutie en ce qu’il concerne la “question de la démocratie”. En effet, la révolutionnaire allemande ne se bat simplement pour renverser les antagonismes de classes, mais aussi pour approfondir la question de la démocratie. Ainsi, la démocratie ouvrière telle qu’elle est conçue par Rosa Luxemburg devient un des piliers fondateurs en ce qu’il concerne la mise en pratique du socialisme scientifique21. Toutefois, la démocratie ouvrière ne peut se mettre en place sans les fondements mêmes de la démocratie bourgeoise et de la société capitaliste. Il convient sans nul doute de souligner d’une certaine manière que l’idéal ne fait plus guère référence à l’utopie, mais bien au pragmatisme qui en découle afin de laisser une forme de “démocratie réelle” pour paraphraser Karl Marx. On reprendra ces termes pour compléter nos propos :

La plus grande conquête de la lutte de classe prolétarienne au cours de son développement a été la découverte que la réalisation du socialisme trouve un appui dans les fondements économiques de la société capitaliste. Jusque là le socialisme était un “idéal”, l’objet de rêves millénaires de l’humanité ; il est devenu une nécessité historique. 22

La question de fonder le socialisme se traduit dans les faits par la mise en place d’une démocratie digne de ce nom. En effet, la question de la dictature du capital laisse entrevoir que malgré la différenciation entre les différents partis politiques, la notion demeure la même. En effet, il incombe de mettre en place révolution prolétarienne afin de justement de recréer les éléments nécessaires pour le passage démocratie pleine et entière. Ainsi, le socialisme sans la démocratie ouvrière avec pluralisme des idées, la séparation des pouvoirs, la liberté de la presse, etc, ne peut être reconnu à juste titre comme faisant partie du processus historique de la conquête prolétarienne du pouvoir. Ensuite, le prolétariat dans le cadre de son organisation démocratique ne peut qu’accélérer les outils démocratiques afin de créer un véritable front contre l’extrême-droite. En effet, les outils mis à disposition peuvent servir d’une façon ou d’une autre aux pires ennemis de la République et de la patrie socialiste. Dans ces conditions, il semble nécessaire de créer des garde-fous pour protéger la démocratie. 

Pour sortir de ce cercle, il suffit de reconnaître ce que le libéralisme bourgeois a rendu l’âme, épouvanté par le développement du mouvement ouvrier ; on conclura que le mouvement ouvrier socialiste est aujourd’hui le seul soutien de la démocratie, il n’en existe pas d’autre. On verra alors que ce n’est pas le sort du mouvement socialiste qui est lié à la démocratie bourgeoise, mais inversement celui de la démocratie qui est lié au mouvement socialiste. On constatera que les chances de la démocratie ne sont pas liées au fait que la classe ouvrière renonce à la lutte pour son émancipation, mais au contraire au fait que le mouvement socialiste sera assez puissant pour combattre les conséquences réactionnaires de la politique mondiale et de la trahison de la bourgeoisie (souligné par moi)23

Lorsque Rosa Luxemburg parle de concrétiser que le prolétariat s’empare du pouvoir politique, il semble juste nécessaire de voir que cela peut prendre la forme d’élection où le mouvement ouvrier est majoritaire au Parlement. Dans ce cadre, les élections font intervenir d’une manière ou d’une autre la question rhétorique ou non s’il s’agit d’une forme de “dictature du prolétariat”. Ainsi, il semble tout à fait nécessaire de voir que la “terminologie” utilisée à la fin du XIXe et début XXe s’abstrait d’une opposition que peut renvoyer le parlementarisme comme des république bourgeoise, c’est-à-dire la dictature du capital. La question de la démocratie ouvrière ne peut que se transformer au travers de la prise du “pouvoir” par le prolétariat, c’est-à-dire par les salariés eux-mêmes. Ainsi, toute la nuance réside dans le fait ce qu’il différencie “dictature” et “démocratie”, mais aussi vis-à-vis de quel référentiel ? Dans ces conditions, il semble que dialectiquement, la notion même de la démocratie ouvrière plutôt que d’une dictature ouvrière permet entre autres la véritable question de la position démocratique au sein du mouvement ouvrier.

Dans le domaine politique, l’évolution du système conduit, si le terrain y est favorable, à la démocratie, à la participation de toutes les couches de la population à la vie politique. On s’oriente donc en quelque sorte vers un “Etat populaire”. Mais ceci dans le cadre du parlementarisme bourgeois où les antagonismes de classe, loin d’être résolus, s’étalent au contraire au grand jour. L’évolution du capitalisme oscille donc entre des contradictions ; pour dégager le noyau socialiste de la gangue capitaliste, il faut que le prolétariat s’empare du pouvoir politique, et que le système capitaliste soit entièrement aboli (souligné par moi)24.

La question fondamentale en ce qu’il concerne le “prolétariat” réside dans l’aspect salvateur de la démocratie. En effet, une démocratie pleine et entière suggère fondamentalement une réorientation du mouvement ouvrier dans le cadre de la “démocratisation” qui s’avère être simplement indispensable. Ainsi, il apparaît que la conquête du prolétariat du “pouvoir politique” ne peut résider dans un quelconque régime autoritaire. Or, les régimes qui s’autoproclament du socialisme à notre époque, ne se démocratisent pas. Ils sont l’antithèse absolue de la démocratie ouvrière. Ainsi, l’ouvrier du secondaire comme du tertiaire doit pouvoir choisir librement la question fondamentale de quel type de démocratie, il doit faire face tout en sachant que la bourgeoisie porte en elle la nuée ardente du fascisme. Dans le même temps, notre époque s’inscrit d’une façon ou d’une autre où nous assistons à une dynamique créant de grande défaites en termes de droits, mais aussi au niveau du progrès. La démocratie a rarement été autant malmenée par la bourgeoisie. Faut-il conclure que les “libéraux économiques” ne sont que l’antithèse du mouvement démocratique ? Le lecteur aura la sagesse de trouver lui-même les réponses.

En un mot, la démocratie est indispensable, non pas parce qu’elle rend inutile la conquête du pouvoir politique par le prolétariat ; au contraire, elle rend nécessaire et en même temps possible cette prise du pouvoir. Lorsque Engels dans sa préface à La lutte des classes en France révisait la tactique du mouvement ouvrier moderne, opposant aux barricades la lutte légale, il n’avait pas en vue – et chaque ligne de cette préface le démontre – le problème de la conquête définitive du pouvoir politique, mais celui de la lutte quotidienne actuelle. Il n’analysait pas l’attitude du prolétariat à l’égard de l’Etat capitaliste au moment de la prise du pouvoir, mais son attitude dans le cadre de l’Etat capitaliste. En un mot, Engels donnait les directives au prolétariat opprimé, et non au prolétariat victorieux (souligné par moi)25.

Quoi qu’il en soit, la question d’une démocratie ouvrière ne peut que se positionner sur le questionnement de l’idéologie du ML. En effet, si la “dictature du prolétariat” s’avère être une théorie majeure au sein du marxisme, il en demeure pas moins qu’elle est contestable notamment dans son apport idéologique et théorique tout comme de son apport pratique. La réalité réside dans les éléments que la société telle qu’elle est défendue réside uniquement dans une forme de dystopie dialectique.

La dictature du prolétariat

Il ne fait guère de doute que si je cite occasionnellement Lénine, je m’inspire entre autres des différentes sources afin d’appuyer les différents articles. La question demeure tout de même dans la notion même de “dictature du prolétariat” :

L’Etat est un “pouvoir spécial de répression”. Cette définition admirable et extrêmement profonde d’Engels est énoncée ici avec la plus parfaite clarté. Et il en résulte qu’à ce “pouvoir spécial de répression” exercé contre le prolétariat par la bourgeoisie, contre des millions de travailleurs par une poignée de riches, doit se substituer un “pouvoir spécial de répression” exercé contre la bourgeoisie par le prolétariat (la dictature du prolétariat). C’est en cela que consiste la “suppression de l’Etat en tant qu’Etat”. Et c’est en cela que consiste l'”acte” de prise de possession des moyens de production au nom de la société. Il va de soi que pareil remplacement d’un “pouvoir spécial” (celui de la bourgeoisie) par un autre “pouvoir spécial” (celui du prolétariat) ne peut nullement se faire sous forme d'”extinction” (souligné par moi)26.

Le mot “dictature” s’entend par au-delà de la contradiction comme l’antithèse du régime “bourgeois” et de la main-mise du capital comme nous l’avons vu plus haut. Toutefois, la notion de la violence au travers du processus révolutionnaire renvoie étrangement à la question même que l’on peut voir de la fausseté du caractère progressiste d’une telle conception :

Celui-ci ne peut céder la place à l’Etat prolétarien (à la dictature du prolétariat) par voie d'”extinction”, mais seulement, en règle générale, par une révolution violente. Le panégyrique que lui consacre Engels s’accorde pleinement avec de nombreuses déclarations de Marx (rappelons-nous la conclusion de la Misère de la philosophie et du Manifeste communiste proclamant fièrement, ouvertement, que la révolution violente est inéluctable; rappelons-nous la critique du programme de Gotha en 1875, près de trente ans plus tard, où Marx flagelle implacablement l’opportunisme de ce programme)27.

La question de la dictature pourrait poser de nombreuses questions quant à sa dialectique. Toutefois, il s’agit d’une certaine manière de créer un autre régime où le prolétariat a pris le pouvoir au travers de la “domination de la majorité”. Cette vision s’inscrit dans les craintes de la position très claire de Tocqueville. Pour autant, la mécanique des “forces armées” du prolétariat tend clairement à armer le prolétariat. Or, dans une dictature : aucune dictature ne possède la “séparation des pouvoirs”. Il faut comprendre également dans le cadre du renversement de la hiérarchie des normes : le prolétariat dirige alors qu’il est majoritaire et la bourgeoisie est dirigée puisqu’elle est minoritaire. Ainsi, la dictature du prolétariat apporte d’une certaine manière sur la question d’un point de vue de la majorité. De telle sorte, on peut se questionner sur le paradoxe de la dictature-démocratique afin de reprendre la thèse de Trotski au travers de la Révolution Permanente. Pour autant, il faut qu’on se le dise que les expériences démocratiques pendant la guerre mondiale, civile russe et ukrainienne (la Makhnovtchina et Kronstadt) ont été renversées par le chef de l’Armée rouge. Ainsi, nous avons une contradiction dans la théorie et la pratique.

La doctrine de la lutte des classes, appliquée par Marx à l’Etat et à la révolution socialiste, mène nécessairement à la reconnaissance de la domination politique du prolétariat, de sa dictature, c’est-à-dire d’un pouvoir qu’il ne partage avec personne et qui s’appuie directement sur la force armée des masses. La bourgeoisie ne peut être renversée que si le prolétariat est transformé en classe dominante capable de réprimer la résistance inévitable, désespérée, de la bourgeoisie, et d’organiser pour un nouveau régime économique toutes les masses laborieuses et exploitées (souligné par moi)28.

La dictature du prolétariat s’accompagne comme l’acte préparatoire de la “révolution socialiste”. En effet, le passage du capitalisme au socialisme qui se comprend comme l’une des étapes fondamentale dans la transition vers le socialisme se réalise au travers de la prise du pouvoir par le prolétariat dans le cadre d’un parti. Cette dangerosité souligne également l’élément moteur de la mise en place d’un “socialisme”. Pour autant, la volonté de créer un parti guidant le prolétariat ne peut que déboucher sur un des grands dangers. En effet, la volonté tend à créer des “leaders politiques” alors que l’un des slogans dans l’Internationale est “ni Dieu, ni César, ni tribun” . Dès à présent, nous avons un recul pour comprendre que les tensions actuelles ne peuvent en aucun cas permettre un nouveau régime de ce type qui ne peut s’apparenter uniquement comme autoritaire. Dès à présent, la recherche de la liberté et du socialisme ne font plus qu’un seul pilier.

La Révolution Russe ne peut que se voir comme une Révolution Trahie en raison de la bureaucratisation mis en place par Staline, mais aussi des conditions épouvantables et des crimes contre les droits de l’Homme orchestrés à cette époque. Même si aucune personne n’est en mesure de condamner ces actes ignobles au travers de la Justice, le jugement politique permet de condamner ces actes en bonne et due forme. Ainsi, la dictature du prolétariat partout où elle est appliquée au travers d’un parti se revendiquant du socialisme afin d’amener le communisme débouche en réalité sur une dictature sanglante et typique de tous les régimes autoritaires. Dès lors, la dictature du prolétariat apparaît comme une grosse forfaiture intellectuelle et dans la pratique. Or, la volonté de créer d’une certaine manière une révolution par étape s’inscrit également dont la vision qui sera reprise par la théorie stalinienne, mais qui ne se chargera jamais d’appliquer les différentes étapes du “socialisme”. Le stalinisme n’était d’ailleurs qu’un “capitalisme d’Etat”. Ainsi, tous les régimes qui s’imprègnent pour mettre en place la “transition socialiste” au travers d’un système étatique ne peuvent que déboucher sur le dilemme du Tramway : le capitalisme ou le socialisme ? Or, la majorité des personnes préfère le confort du capitalisme sans mettre en place d’une transition démocratique et sociale pour la construction de la “patrie socialiste”.

Nous ne sommes pas des utopistes. Nous ne “rêvons” pas de nous passer d’emblée de toute administration, de toute subordination; ces rêves anarchistes, fondés sur l’incompréhension des tâches qui incombent à la dictature du prolétariat, sont foncièrement étrangers au marxisme et ne servent en réalité qu’à différer la révolution socialiste jusqu’au jour où les hommes auront changé. Nous, nous voulons la révolution socialiste avec les hommes tels qu’ils sont aujourd’hui, et qui ne se passeront pas de subordination, de contrôle, “surveillants et de comptables” (souligné par moi)29.

La dictature du prolétariat s’oppose foncièrement à la dictature du capital. L’universalisme au niveau de la vision du suffrage questionne quant à la position de fond de la violence qui est développée par les partisans de la dictature du prolétariat. En effet, l’élargissement de la démocratie telle qu’elle est conçue permet au prolétariat de se doter de différents outils permettant à ce dernier “la prise du pouvoir”. Ainsi, dans l’Histoire, le renversement des forces internes au niveau des Etats-Nations, mais aussi au niveau mondial peut créer une prise du pouvoir par les urnes afin de créer une autre forme de dynamique plus proche du “peuple” (dans le sens que toutes les classes sont mieux représenté). De ce fait, la dictature du prolétariat s’avère être l’élément moteur pour la mise en place d’une démocratie intégrale. 

Toutefois, la recette du parlementarisme s’avère fondamentale dans le système bourgeois et devient un élément central dans la question du législateur. Or, il s’avère d’une certaine manière que la “dictature” ne permet pas de créer la “séparation des pouvoirs” : l’exécutif, le législatif et le judiciaire sont soumis au même pouvoir. Ainsi, nous pouvons voir qu’il y a un questionnement qui se pose : qu’est-ce la démocratie ouvrière sous la dictature du prolétariat ?

Lénine parle de violence et de répression et d’une démocratie qui ne peut pas exister sans la liberté. Or, nous avons très bien vu que sous la Commune de Paris que Karl Marx vantait dans la Guerre civile en France était l’expérience la plus aboutie en matière de gestion ouvrière de la cité. Toutefois, il semble nécessaire de voir que cette gestion n’était pas au niveau national. En effet, le “modèle fédéraliste” (ou plutôt communaliste) que les “communards” opposaient aux Versaillais. Ainsi, nous sommes dans le paradoxe de Lénine : la recherche de la démocratie au travers de la dictature.

Or, la dictature du prolétariat, c’est-à-dire l’organisation de l’avant-garde des opprimés en classe dominante pour mater les oppresseurs, ne peut se borner à un simple élargissement de la démocratie. En même temps qu’un élargissement considérable de la démocratie, devenue pour la première fois démocratie pour les pauvres, démocratie pour le peuple et non pour les riches, la dictature du prolétariat apporte une série de restrictions à la liberté pour les oppresseurs, les exploiteurs, les capitalistes. Ceux-là, nous devons les mater afin de libérer l’humanité de l’esclavage salarié; il faut briser leur résistance par la force; et il est évident que, là où il y a répression, il y a violence, il n’y a pas de liberté, il n’y a pas de démocratie (souligné par moi)30.

La volonté de Lénine d’opposer la démocratie capitaliste ou bourgeoise qu’il faut comprendre comme le parlementarisme à la dictature du prolétariat comme époque de transition pour construire la démocratie de demain afin que la “majorité silencieuse” puisse gérer la tournure à prendre. 

Cependant dans le cadre de l’Union Européenne et de la vision de l’Europe (que je défends), nous le voyons très bien que cette théorie se confronte fondamentalement aux différentes soupapes de secours des différentes juridictions européennes. La tentation pour créer une démocrature serait dangereuse. Le Communisme n’a pas besoin de dictature afin de dépasser l’Etat. Dans le même temps, la question de la désintégration de l’Etat advient comme une forme d’utopisme qui s’inscrit comme l’une des phases post-capitaliste.

Ainsi donc, en société capitaliste, nous n’avons qu’une démocratie tronquée, misérable, falsifiée, une démocratie uniquement pour les riches, pour la minorité. La dictature du prolétariat, période de transition au communisme, établira pour la première fois une démocratie pour le peuple, pour la majorité, parallèlement à la répression nécessaire d’une minorité d’exploiteurs. Seul le communisme est capable de réaliser une démocratie réellement complète; et plus elle sera complète, plus vite elle deviendra superflue et s’éteindra d’elle-même31.

Pour clôturer la notion même, on verra que la rhétorique léniniste s’avère très proche de la rhétorique stalinienne :

Pour ces messieurs, la “dictature” du prolétariat “contredit” la démocratie ! ! Au fond, rien de sérieux ne les différencie des démocrates petits-bourgeois32

Le coup d’Etat des bolchéviks durant la “révolution d’Octobre” se transcrit par le moyen de transformer de la gestion du pouvoir sous la forme d’un parti unique. Ainsi, la dictature du prolétariat qui devait être l’antithèse de la République bourgeoise au travers du parlementarisme s’est avérée être nul et non avenue. En effet, sous la question de la “dictature” a laissé place à une dictature féroce et la mise en place du ML ouvrant la voie au totalitarisme débouchant sur des crimes contre l’Humanité entre 1917 et 1991 comme nous l’avons ci-dessus.

Pour autant, la chute de l’Union Soviétique aurait dû laisser dans les mémoires la réalité de la philosophie de Lénine. Mais que penser finalement de son bras droit : Léon Trotski ? En effet, une dictature du prolétariat sous Lénine ou qu’elle aurait été sous Léon Trotski demeure la même chose : une dictature à parti unique.

Une vision incombe rigoureusement à savoir ce que l’on considère comme une “dictature” dans le cadre où le parlementarisme actuel peut être considéré comme une dictature du capital. En effet, les partis changent, mais la politique bourgeoise s’inscrivant dans tous les domaines de notre vie laisse entre elles une vision tantôt conservatrice, tantôt libérale.

De ce fait, il advient qu’au travers de la démocratie ouvrière telle qu’elle est formulée par Rosa Luxemburg permet entre autres de fédérer les ouvriers du secondaire tout comme ceux du tertiaire en faisant advenir les salariés au sein de leur Parlement nationaux. Pour autant, la question de la quête des régimes parlementaristes par le prolétariat permet de créer une forme de démocratie claire et nette avec l’ensemble des rapports de force en faveur du prolétariat.

Des éléments de langage qui me distingue clairement du ML puisque la position d’un parti unique ne permet pas de créer une véritable ouverture vers le progrès. Au contraire, nous avons constaté et nous constatons encore que les dictatures à parti unique sont embastillées dans la bureaucratie. La démocratie est inaliénable et demeure l’alpha et l’oméga tout comme la défense des libertés individuelles. Ainsi, le communisme a besoin de se renouveler dans un élan démocratique afin de laisser le pluralisme, la liberté d’expression et d’opinion. Sans cela, le communisme en tant que mouvement philosophique est voué à l’extinction, mais aussi à la radicalisation de certains mouvements idéologiques au travers du nationalisme notamment et de l’identitarisme. Il semble nécessaire de voir ces positions dans le cadre des chutes des régimes se revendiquant du socialisme se retrouve aux mains de la réaction néofascisme, néoconservatrice et ultralibéral. Enfin, une politique doit se baser sur la question d’un vote de masse en faveur d’une démocratie ouvrière. Ainsi, le Parlement bourgeois se transforme dans un parlement ouvrier tout en gardant la philosophe libérale dans le cadre de la séparation des pouvoirs.

Le Front progressiste

Nous le verrons ensemble ci-dessous, mais si je crois foncièrement que le communisme advient comme l’avenir et le progrès. Il en demeure pas moins qu’il faille être critique sur la question même des alliances et de la doctrine concernant le “front progressiste”.

À l’heure actuelle, le communisme est décrié par la bourgeoisie tel le “spectre qui hante l’Europe”. Un communisme au XXIe siècle présuppose une vision pragmatique et cohérente. La “lutte finale” contre la bourgeoisie crée un schéma ouvert dans le cadre d’une stratégie visant à amener partout le progrès où cela est possible. L’inverse ne peut que conduire à une forme précise du recul de plusieurs siècles en arrière.

Dans cette période de crise sanitaire, la boussole du progrès s’agite dans tous les sens. De nombreux autoproclamés progressistes lâchent le progrès afin de d’épouser des théories obscures. Devons-nous s’allier avec ces personnes, ces mouvements ou encore ces partis ? Le “barrage républicain” n’a de sens qu’au travers de la défense de la République.

En tant que communiste (luxemburgiste), il semble nécessaire d’aiguiller une boussole où le progrès est axé sur le Nord. Dans le cas inverse, nous risquons de passer outre sur un siècle perdu et de perdre l’ensemble des conquêtes sociales. Le mouvement réactionnaire poursuit son oeuvre depuis près de quarante ans.

Le capitalisme poststalinien

Ensuite, la réaction poststalinienne laisse clairement des dégâts importants. Les nationalistes reprennent les théories de Staline pour les adapter à leur logique. De telles sortes à ce que le totalitarisme rampant de l’URSS s’adapte très clairement à la question de l’isolationnisme

Moscou a changé ses couleurs : le rouge vers le bleu nationaliste afin de procéder concrètement à une mise en application de leurs visions de la société33. Le socialisme dans un seul Etat a laissé place à un capitalisme isolé au travers des frontières économiques et matérielles. La doxa réside d’une certaine manière de voir le changement d’une façon ou d’une autre dans l’idolâtrie de la Nation. En faisant passer la question de la nation sur l’individu, il existe ainsi une forme de reproduction du totalitarisme tel qu’il a été explicité par Hannah Arendt 34. De ce fait, Marine Le Pen et ses sbires ont une volonté d’appliquer la théorie stalinienne remodelée d’une certaine façon au capitalisme.

Toutefois, il semble nécessaire de voir que le stalinisme était également une forme de capitalisme sous couvert d’une promotion du socialisme. Ainsi, le capitalisme développé par l’extrême-droite française, mais aussi internationale a la particularité de créer un système ultra-libéral à l’intérieur opposant les travailleurs entre eux afin de gagner dans la productivité, la baisse des salaires et accroître les dividendes pour les propriétaires d’actions.

Dans le même temps, cette logique devrait entre autres s’accompagner d’une dynamique en faveur des traités de “libre-échange” alors que la logique s’inscrit dans le protectionnisme 35. De ce fait, du stalinisme au lepénisme tout comme la politique de Donald Trump durant son mandat s’inscrit typiquement dans la construction de la “patrie” et de la “nation” sous l’égide du “capitalisme dans un seul Etat” démontrant l’aspect totalitaire de la vision décrite.

La question de l’administration de Trump 36 ou encore celle du Brexit 37 pose de nombreuses questions. En effet, l’isolationnisme tout comme le protectionnisme demeure des idées aux antipodes du capitalisme moderne et constitue d’ailleurs un repère identitaire. Ce terrain propice aux différentes politiques ne peut que déboucher sur un nationalisme rampant et le terrorisme de l’intérieur.

Il semble nécessaire de voir qu’il y ait une “International Brune” 38 se positionnant progressivement sur tous les sujets sociétaux tout comme économique. Ainsi, le combat se retrouve autant au niveau national que supranational. En effet, face à l’arc obscurantiste, la question de combattre sans exclusion les mouvements idéologiques reprenant les idées du néofascisme de près comme de loin s’inscrit dans une logique sans compromission. Dès lors, le combat est total et sans pitié. En effet, il advient très clairement de souligner que lorsqu’il y a un début de compromission comme le réalise le gouvernement alors l’extrême-droite devient dès lors une alternative pour mettre un programme cousin. Le combat avec le fascisme ne se négocie pas.

La tentation de l’Etat Policier comme alternative à la l’Etat de droit

Ma position réside dans le fait de défendre l’Etat de droit et non l’Etat légal, c’est-à-dire l’Etat Policier. Je pense clairement qu’il faille le pouvoir judiciaire tout comme le pouvoir exécutif. Il y a une volonté également d’augmenter le nombre de forces de l’ordre. Cela permet de rassurer la bourgeoisie, mais aussi de garantir l’ordre public. Dans ces conditions précises, il semble nécessaire de voir que nombreux partis politiques ou mouvements se targuent de caresser dans le dos les différentes corporations policières. En effet, cela permet entre autres de réaliser du clientélisme au grand profit de la classe dominante qui est rassurée. Ainsi, les réformes concernant la Sécurité permettent de réaliser d’une façon ou d’une autre la stabilité paradoxale du système politico-policier. Enfin, soulignons que la paix civile est garantie au prix du sacrifice de toutes les libertés individuelles.

Dès lors, la vision d’un antifascisme populaire doit reprendre l’ordre de bataille face aux différents partis de l’ordre jusque dans le Parti Communiste Français :

Je pense qu’elle avait parfaitement raison. Face à cette tentative de putsch provenant de mercenaires et soutenue par le pouvoir en place tout comme une armada de citoyens et de politiciens du Parti Communiste Français jusqu’au néo-nazi, il ne se fait pas l’ombre d’un doute que le “droit à l’état policier” devient une revendication majeure.

Les questions sécuritaires interviennent à un moment donné où dans le désespoir ambiant, le “sentiment d’insécurité” se développe fortement au sein de la classe dominante. Dans les faits, cela suggère que la vision d’un régime autoritaire comme “garde-fou” de la République advient à un moment clef dans la construction du processus historique du rapport de force entre le capital et le travail. 

Les circonstances peuvent paraître abstraites, mais la vision de défendre les revendications des gardiens du “libéralisme économique” ne peut que déboucher sur un malaise de l’autre partie de la société. En effet, la spirale sans fin qui entraîne davantage de lois en faveur de la sécurité rogne progressivement sur le “libéralisme philosophique”. Le lecteur comprendra d’une façon très claire que la surenchère sécuritaire ne peut que déboucher sur une transition progressive vers “l’Etat policier”. 

À partir de ce moment-là, la question réside dans le fait de défendre les “libertés individuelles”. En effet, le passage vers un néofascisme se transcrira au travers d’une préparation du droit. Le format de la sauvegarde de la République vis-à-vis des dérives trouve également dans le fait que l’on ne puisse plus critiquer les Forces armées du capital sans risquer une plainte par le violeur présumé Gérald Darmanin. Les méthodes d’intimidation font partie des recettes pour faire taire l’opposition et de ce fait en finir avec la démocratie.

L’alternative est le Front Progressiste

La question concrète du “progrès” s’inscrit très clairement dans une vision où les différents courants se réclamant du libéralisme économique n’ont fait qu’accroître la percée idéologique de l’extrême-droite. De telles sortes à ce qu’il n’existe à ce jour aucune mesure progressiste sauf exception faite en ce qu’il concerne “la PMA“. Ainsi, l’exception étant citée, le reste n’appartient qu’à la contre-révolution réactionnaire et conservatrice.

Les forces progressistes autant dans la pratique que dans la théorie doivent s’unir afin de faire “front commun” contre la peste brune. Ainsi, il convient de refaire revivre l’idéal républicain au travers du modèle “démocratique et sociale” afin d’aboutir jusqu’au bout la “République” et non de laisser la République comme un “monstre bourgeois”. En effet, la “République Française” actuelle peut dès lors opérer une mutation vers un régime néofasciste. Toutefois, les conditions ne semblent pas atteintes afin que nous allions la transition d’une “République Démocratique et Sociale” 39, mais bien vers un modèle Hybride se réclamant de la République.

Le passage progressif vers un “Etat légal” 40 où le droit n’est plus qu’une archétype permettant entre autres de faire passer tout un ensemble de mesure afin de rester dans la légalité. On notera dans un même temps que la notion renvoie à également à Charles Maurras qui soulignait de défendre les valeurs monarchiste en rupture avec l’idéal républicain. Les germes du fascisme au XIXe siècle se situait clairement au niveau des individus en s’atomisant au profit de la “mère patrie”. L’intérêt supérieur de cette dernière ne pouvait que corrompre les libertés individuelles. Or, c’est justement à partir de la rupture que nous assistons d’une manière ou d’une autre à une vision totalement hybride au niveau du XXIe siècle. Au niveau européen, il existe des soupapes empêchant dans la théorie la lente déliquescence des pays au travers d’un système de contrôle et de régulation des droits fondamentaux.

Pour conclure, la situation actuelle en ce qu’il concerne la pandémie du Coronavirus laisse entrevoir un certain nombre de dérapages intempestifs et nauséabonds. De telles sortes à ce qu’un grand “sursaut républicain” ne peut que s’articuler sur des valeurs et un idéal. Ainsi, il appartient à changer de trajectoire afin de faire naviguer un “front progressiste” afin de remplacer le “barrage” ou “front républicain”.

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